Peintures de Michelle LACOSTE, Philippe CHAMBON, JIDE et Leire IRARRAGORRI, sculptures de Virginia ALFONSO, d’EMER et de Julien PELISSOU, dessins de Eleonora BURRY, bijoux en cuivre de DUA et gravures de Pascale PARREIN.
Trois artistes se penchent sur la question de l’intimité. En partant d’une approche extérieure, nous cheminons au travers de sensations de plus en plus impalpables, indicibles et mouvantes. Nous explorons les espaces de l’intime et leurs limites dans nos intériorités : le corps, les organes, le sexe, l’enfance, les rêves, les journaux intimes, les réminiscences tactiles..
Peut-on parler de l’intime ? Le dévoiler ? Le montrer ?
Où réside l’intimité pour chacune d’entre nous ?
La pratique artistique n’est -elle pas elle-même de l’ordre de l’intime ?
Barbara Fougnon – Trois portraits
A travers ces portraits je souhaite donner place au corps des femmes d’âge mûr, si souvent invisibilisées dans notre culture. Porter le regard sur leur réalité, leurs ressentis, leur force de vie.
Claudine Meyer – sculptures textiles
Dans ces sculptures textiles, le drap représente un espace d’intimité. Le corps en est absent. Ne reste que des mots brodés, des silences, des traces d’intime que je veux bien montrer.
Véronique Soriano – Peinture et objets
De mon côté, je suis allée du côté des Filles de l’ogre sans bien savoir pourquoi. J’y ai trouvé et retrouvé des sensations tactiles très anciennes, une émotion d’enfance. Alors j’ai exploré « intimité(e)s » auprès d’hommes, de femmes dans une sorte d’enquête illustrée, comme un petit journal. Puis auprès de moi- même dans une série de carrés 20×20.
L’intimité qui pour moi évoquait au début de notre travail la sexualité (peintures sur papier 65×50) m’a conduite de plus en plus vers moi même : intimité/féminité, intimité ultime de la mort, intimité qui se dessine et ne se dit pas…
Ma proposition esthétique s’articule autour d’un discours poétique influencé profondément par la réminiscence infantile. Une activation de mes souvenirs qui permet tout en douceur de reconstituer mon passé. Une photo de ma grand-mère petite fille, mon grand-père en culottes courtes, mes parents enfants, ma sœur et moi dans les jeux d’enfants du square de mon quartier ou parcs de la ville.
La série « El cuidado del jardin » nait de l’importance primordiale de garder et soigner les jardins, pas seulement pour leur apport de vie, d’oxygène, de renouvellement cyclique, mais comme métaphore de l’intime, du quotidien familial. Un refuge qui touche au sacré.
Des/affectés La série des «des/affectés» révèle des lieux réactivés par la couture.Des photographies en noir et blanc, témoins d’un passé habité, hanté par la présence absente, ont été prises dans des lieux désaffectés où la vie du lieuest laissée au hasard du passage du temps, des intempéries et de l’humain.Des intrusions par la couture tentent […]
Sculptures de Ch.Madies
« Je travaille depuis plus de trente ans en Italie, à Pietrasanta près de Carrare et ses carrières de marbre.
C’est un lieu magique pour les sculpteurs, avec une tradition du travail du marbre vieille de deux mille ans. Non seulement le marbre, mais aussi une grande variété de pierres sont débitées et travaillées à cet endroit.
J’ai voulu utiliser des pierres de couleurs différentes pour façonner les petites sculptures sur le thème qui m’est cher, celui de la fluidité: sculpter ce matériau lourd, compact et dense qu’est la pierre de sorte qu’elle devienne légère, comme liquide, animée d’ondes qui parfois laissent transparaître la lumière.
» Tout vient à moi, m’enserre et se fait pierre »
Ce vers de Rainer Maria Rilke m’avait frappé. Il évoque pour moi un processus de pétrification, un amenuisement de l’être face aux épreuves de la vie.
On oublie qu’il existe différents états de la matière et qu’elle peut passer de l’un à l’autre, du solide au liquide par exemple.
La pierre elle-même, en apparence statique et immuable, peut devenir fluide lorsqu’elle est soumise à des températures extrêmes.
Sculpter pour moi c’est tenter de décrire cette transmutation. Donner à la pierre et retrouver à travers ce travail de la souplesse, de la douceur, de la légèreté. Se dégager de sa gangue. Se mettre en mouvement. »
Collages de C. Basset
Il y a quelque chose qui pointe. Qui dérange la surface. Un déplacement. Un gonflement.
Des images de Catherine Basset ou de la pierre de Christine Madies, quelque chose veut sortir.
Cela prend souvent des formes voutées. Tout juste entre contrainte et débordement.
On y voit des transparences, des superpositions. Des couches, des densités.
Catherine Basset, lignée surréaliste, dérange les images, y compris celles prises par son père René, étendues à d’autres mondes. Lyonnaise, biologiste de formation, elle a pris longtemps les cours du soir de l’Ecole des Beaux-Arts. Certainement fouillé dans les tiroirs de son papa. Et puis, depuis la marge, elle s’est petit à petit faite dévorée, trouvant son propre langage entre macro et micro, entre l’objectif et l’échappé. Détourant les archives, recoupant les motifs, elle se fait en collant l’ethnologue de contrées entrevues.
Christine Madies, fait, elle, d’un geste franc, des trésors de souplesse. Elle compose des ondes avec les roches de la région de Carrare, qu’elle habite depuis plus de 30 ans. Un coup dans la masse, déjà disparue. Le marbre devient liquide. Du bout des doigts, sa surface caressante renouvelle 2000 ans d’invitation. A toucher, à sentir, à envelopper. A mesurer toutes les possibilités plastiques et sensuelles offertes par un matériel si exigeant. Elle fût assistante sociale mais c’est maintenant tout ce qui l’occupe : extraire le léger du dense, sortir du marbre l’expression.
Le travail que je présente ici est né de l’envie d’explorer en profondeur le geste dans la peinture. Plus exactement de l’envie de libérer le geste de tout biais, de toute contrainte. Il m’est apparu évident qu’il fallait au préalable abandonner l’idée de la figuration. Puis qu’il était nécessaire de mettre de côté également les outils habituels, afin d’être au plus près du corps, des sensations. Des lors que ce préalable était établi, il ne me restait plus qu’à laisser danser le geste, tous mes sens en éveil, jusqu’à parfois entrer dans une sorte de transe, et aller à la rencontre de ces moments rares où le geste devient purement intuitif, où la peinture devient une évidence.
Marc Levasseur
On commence par laisser une trace d’huile sur la surface.
Elle ne veut rien dire, que le début.
Du bout du doigt, elle s’étire. Urgemment.
Les choses bougent, s’écartent, s’entrevoient et se perdent, se diffusent et se concentrent.
La trace d’huile comme nuée chromatique. La tâche d’huile sur un sol sombre, dans laquelle se perd un contemplateur médusé. Des vagues qui s’étendent en mouvement rectiligne, l’objectif tombé bas. La lumière qui glisse et s’échappe. Des silhouettes qui se déforment. Une caméra qui se déporte, brusquement. Un son. Une chute. Une bourrasque.
Marc Levasseur se défend du figuratif. Il parle mouvement. Il parle transe. Révoque le délibéré, s’éloigne de l’exactitude. Part loin. C’est pourtant dans l’oubli que surgit l’imaginaire, un vocabulaire de la forme déjà perdue.
Sans intermédiaire entre la paume et le pigment, il reste fidèle au premier geste de l’artiste, et surtout à tous ceux qui ne lui appartiennent déjà plus. Ceux dont on se demande après comment ils sont venus.
« Certaines œuvres sont les contours flous de moments très précis » Le reste, dit-il, ne le concerne plus.
Arbres plongeant dans la terre et s’élançant vers le ciel.
Ancrés, aériens.
Arbres qui m’accompagnent au bord des routes et des chemins.
Arbres que j’admire pour leurs longévités, leur résistance aux saisons, leurs formes, leurs murmures au gré des vents, leurs supports aux chants d’oiseaux.
Je leur rends hommage par ces quelques toiles…
Massika Bendaoud Diabi
Mon travail consiste dans un premier temps, à feuilleter des magazines puis, je découpe des morceaux d’images qui m’attirent, me captivent et surtout, qui me parlent.
Ces petites portions d’images en papier vont représenter mon univers intérieur, elles épouseront la toile où je viendrai peindre à l’huile et, petit à petit, une histoire prendra vie.
Mes peintures s’inspirent de paysages de différents pays d’Afrique, d’Amérique latine et beaucoup du Maghreb ; elles réveillent en moi une telle sensibilité, elles me procurent une émotion tellement forte que ces payssages s’impriment en moi comme réels.
Des objets d’orients comme les dinanderies (objets en cuivre, fer blanc, étain ou laiton martelés) sont invités à décorer mes peintures pour évoquer les origines de mes attaches, mais également des tendances diverses en décoration intérieure…
Dans le dédale de mes toiles se glissent quelques fois des visages souvent ridés, là où se trouve le reflet de l’âme. Chacun de ces sillons sont des blessures, des souffrances, de l’amour et de l’espoir.